Les oiseaux fascinent les humains depuis toujours. Nos ancêtres préhistoriques devaient être très impressionnées par ces êtres ailés qui volaient au-dessus de leurs têtes. Des peintures et des gravures rupestres témoignent de cette admiration. l’une des plus connues est une gravure qui se trouve dans la grotte du Tajo de las figuras en Espagne. D’après les spécialistes, elle représente une cigogne.
Les oiseaux sont aussi pour eux une source de nourriture importante. Pour les attraper, les hommes préhistoriques doivent essayer de comprendre leurs modes de vie. Là se trouvent certainement les premiers pas de cette science qui a pour objet l’étude des oiseaux et que l’on nomme l’ornithologie .
L’étude systématique des oiseaux ne débute que bien plus tard dans l’antiquité .

grec original de Lysippos de 330 av. J.-C
L’un des pères fondateurs de cette science est le philosophe Aristote .
Né dans les années 384 avant Jésus-Christ dans le village de Stagire en Grèce, il est un penseur très important et très influent .
À l’âge de 17 ans, il suit les cours de Platon à l’académie d’Athènes. Avide de savoir, il veut tout apprendre. Platon dit de lui qu’il a plus besoin de rênes que d’éperons. À la suite de ses études, il devient enseignant dans cette même école .
Il quitte Athènes à la mort de Platon et ouvre sa propre école à Assos . C’est à cette époque qu’il rencontre le philosophe naturaliste Théophraste avec qui il collabore pendant 20 ans . Il devient aussi le tuteur d’Alexandre le Grand qui est le fils du roi de Macédoine.

Aristote revient quelques années plus tard à Athènes et y fonde avec Théophraste une école philosophique nommée le lycée. Celle-ci est également connue sous le nom d’école péripatéticienne, car Aristote aime enseigner en marchant avec ses élèves.
Passionné par la connaissance, il s’intéresse à de nombreux domaines comme la physique, la logique, la poésie, l’éthique, l’économie, mais aussi le monde animal.
Histoire des animaux
Aristote donne une grande importance à la nature et ne cesse de l’observer . Pour lui les matières naturelles possèdent un principe de mouvement et il suffit de l’observer pour le comprendre. Il pense également qu’un premier moteur met en mouvement le cosmos . Il distinguent les êtres vivants qui ont une âme, des plantes qui n’ont qu’ « une âme animée d’une fonction végétative ». Il classe les animaux dans la catégorie des êtres vivants qui ont une âme végétative et sensitive.


Les humains sont dotés en plus d’une fonction intellectuelle . Malgré cette distinction qui sépare les humains des autres animaux, Aristote reconnait 350 ans avant Jésus-Christ une sensibilité aux animaux alors que 1200 ans plus tard Descartes la leur refuse dans sa théorie de l’animal-machine. Comme quoi la modernité n’est pas toujours signe de progrès et peut même générer beaucoup de bêtise et de cruauté . Mais c’est une pratique assez courante chez ceux qui veulent mettre en avant leur propre intelligence que de chercher à rabaisser celles qui les entourent.
Dans son histoire des animaux, Aristote distingue deux grandes catégories.
Les animaux qui ont du sang et ceux qui n’en ont pas ou qui ont un liquide équivalent. On ne sait pas s’il parle de l’hémolymphe, mais il range les insectes dans la catégorie des non sanguins.
Parmi ceux qui n’ ont pas de sang ( les anaima) on trouve des invertébrés comme les gastéropodes, les crustacés classés dans les animaux à coquille molle ou les animaux mous comme les céphalopodes.
Aristote range les coléoptères dans la catégorie des animaux qui volent et qui n’ont pas de sang . il va dans le détail et parle même des ailes qui se trouvent sous les élytres.
Il ne craint pas non plus de s’intéresser aux animaux mal-aimés et consacre un petit chapitre à la formation des puces et des poux ou à ’accouplement des araignées .
Le livre est une longue description de tous les animaux qu’il rencontre . 508 animaux sont décrits. Les humains eux-mêmes sont classés parmi les animaux et font l’objet de nombreux articles.
Il dresse notamment le portrait de l’appareil génital de l’homme et de la femme. Chez l’homme, il détaille le pénis, le gland et le prépuce. Il note aussi le caractère cartilagineux et extensible de l’ensemble qui « sort et rentre à l’inverse de ce qui se passe chez les animaux à queue à longs crins » (???) .
Le sexe de la femme est décrit plus succinctement « comme une disposition contraire à celui des mâles. Il note toutefois « qu’ un urètre se trouve hors de l’utérus pour le passage du sperme du mâle ».
Tous les animaux, dit -il, possèdent ses parties qui servent à émettre du sperme . Il appelle femelle « l’être qui émet du sperme en soi-même et mâle celui qui l’émet dans cet autre. »
Il établit aussi une échelle de la nature .
Comme souvent chez les philosophes, les humains tiennent le haut du classement puis viennent les quadrupèdes vivipares, les Cétacés, les Animaux sanguins, les ovipares, les Céphalopodes, les Crustacés, les Animaux segmentés, les Mollusques à coquilles, les Zoophytes (entre animaux et végétaux), les Plantes supérieures, les Plantes inférieures,
Et pour finir tout en bas, les êtres inanimés.
Le narcissisme est une force très puissante et peu d’humains sont capables de le dépasser . Aristote n’échappe pas à la règle et ne peut s’empêcher de se servir au passage.
« Chez l’homme, écrit-il, plus que chez les autres animaux, la distinction entre le haut et le bas correspond aux positions naturelles ( !!!) En effet, le haut et le bas sont disposés conformément au haut et au bas de l’univers (rien que ça).
Le devant et le derrière , la droite et la gauche ont la même disposition conforme à la nature. Chez les autres animaux, cette disposition ou bien ne se retrouve pas , ou, si elle se retrouve c’est d’une manière plutôt confuse. »
Les oiseaux (Ornithes)
Les oiseaux se trouvent dans la catégorie des animaux sanguins avec les poissons, les reptiles , les amphibiens et les mammifères qu’il appelle « les animaux intérieurement vivipares ».
Aristote en décrit 180. Il note qu’ « ils ont une tête , un cou, un dos, les régions antérieures du corps , la partie qui correspond à la poitrine et deux jambes comme l’homme ». D’après lui « ce sont les animaux qui s’en rapprochent le plus » .
Son livre est le premier ouvrage qui essaye d’établir un classement en se basant sur des caractéristiques objectives. Il décrit les organes et les comportements avec une grande finesse . Il défait aussi des croyances .
Au sujet du coucou, par exemple, il écrit que certains pensent que cet oiseau « viendrait de la métamorphose du faucon parce que ce dernier disparait au moment où le coucou apparait ». Puis il démontre que cela semble peu plausible vu les différences importantes entre les deux espèces.
« En réalité, dit -il, le coucou pond mais sans avoir fait de nid » mais pond quelque fois dans le nid des oiseaux plus petits que lui ».
Il ajoute que la femelle pond un seul œuf dans le nid de petits ramiers et notamment dans celui du pouillot qui élève ensuite le petit coucou comme s’il était son petit .
Très observateur, il a remarqué que certains oiseaux aimaient se baigner et que d’autres se roulent dans la poussière . « Ceux qui ne sont pas de bons voiliers et qui ne quittent pas le sol se roulent dans la poussière ».
La description, très vivante, m’a rappelé cette bande de moineaux, dans mon ancienne maison, qui passait la journée dans la cour. L’été ils creusaient des petits trous dans la terre puis frottaient leurs ailes sur le sol pour se débarrasser des saletés ou des parasites.

La description du développement de l’œuf et de la formation du fœtus est aussi remarquable de précision . On ne doit pas oublier que ce texte a été écrit 325 ans avant Jésus-Christ :
« La semence de tous les oiseaux est blanche , comme celle de tous les animaux. Au moment de l’accouplement , la femelle la reçoit près du diaphragme. Et au début apparait un petit point blanc, qui devient ensuite rouge et sanguinolent, puis, en grossissant, passe entièrement au jaune pâle et au jaune foncé. […..]
Ce point palpite et remue comme un être vivant , et il en part deux conduits veineux pleins de sang, enroulés en spirale, qui s’étendent, à mesure que l’embryon grandit, vers chacune des enveloppes qui l’entourent. Et une membrane avec des fibres sanguines entoure dès ce moment-là le jaune, à partir des conduits veineux . Peu de temps après , le corps commence à se distinguer : il est d’abord extrêmement petit et blanc. La tête est visible et dans celle-ci , les yeux qui font fortement saillie. »
Aristote décrit aussi les modes de couvaison . Il a remarqué que chez certaines espèces les parents se partageaient la couvaison alors que chez d’autres, comme la corneille, la femelle est seule à couver les petits . « Dans ce cas ce sont les mâles qui se chargent de la nourrir , qui leur apportent de quoi manger et le leur donnent. »
L’ouvrage contient aussi de nombreuses erreurs bien compréhensibles.
Selon lui, les œufs ne donneront aucun juvénile si l’orage gronde pendant la couvaison . Aristote croit aussi que le rossignol se cache pendant l’hiver pour réapparaitre au printemps et que le rouge-gorge devient un rouge-queue au printemps puis se retransforme rouge gorge au début de l’automne. Il se trompe aussi sur le merle noir qui, dit-il, devient roux en hiver .
« Beaucoup d’oiseaux changent, selon les saisons, de couleur et de voix : ainsi le merle de noir devient roux et sa voix se modifie . »
Il note que son chant est beau et mélodieux en été et qu’il est perçant et discordant en hiver . Aristote n’a pas encore compris que la femelle et les petits sont brun roux et que seuls les mâles adultes sont noirs.
