La fabrication des œufs

L’œuf au départ est tout simplement un ovocyte. La femelle en possède dès la naissance de très nombreux (200 000) qui sont agglutinés sur les follicules dans l’ovaire et qui arrivent à maturité les uns après les autres. Lorsqu’un ovocyte* est prêt pour la fécondation, on le nomme alors ovule.  L’ovule mûr est alors recueilli dans le pavillon et descend dans l’oviducte où il peut être fécondé. S’il est fécondé à ce moment-là par le sperme du mâle , il poursuivra sa route et donnera un juvénile. À ce stade, l’ovule qui circule dans l’oviducte n’est encore constitué que du jaune. C’est là que la fécondation doit avoir lieu.  Elle devient impossible dès que le blanc de l’œuf commence à se former autour du jaune.

Oeufs de merle Domaine public

Il faut environ 3 à 4 heures pour que le blanc entoure complètement le jaune. L’œuf poursuit alors sa route et arrive dans l’utérus où la production de la coquille va se dérouler. C’est l’étape la plus longue puisqu’il va falloir 18 à 20h heures pour que la femelle réalise cet exploit. Elle fabrique d’abord deux membranes qui entourent le blanc puis elle utilise une poudre calcaire présente dans les fluides utérins et les os pour former la coquille.  Celle-ci a plusieurs fonctions. Elle est une barrière qui limite la pénétration des microbes, mais permet aussi les échanges gazeux respiratoires grâce à sa porosité. Elle augmente aussi la résistance aux chocs et à l’écrasement. Elle est enfin une source de minéraux dans lequel le fœtus puisera lors de la formation du squelette.

Les oiseaux sauvages ne pondent en général que des œufs fécondés même si des pontes d’œufs non fécondés peuvent être observées. Cela est beaucoup plus fréquent chez les poules qui ont été sélectionnées pour pondre des œufs.

La qualité et la quantité des œufs ont tendance à baisser avec l’âge, car la femelle a moins de force et a plus de mal à produire le calcium nécessaire à la fabrication de la coquille . L’âge réduit la qualité de la coquille mais aussi sa forme qui n’est plus aussi parfaite qu’avant . Il a aussi une incidence sur la qualité fonctionnelle de l’œuf.

La formation de l’œuf de l’ovulation jusqu’à la ponte dure de 24 à 28 heures.

1. coquille 2.Membrane coquillière externe 3. Membrane coquillière interne 4. chalaze 5. Blanc de l’œuf (Albumen) externe 6. Blanc d’œuf interne 7.Peau du jaune d’oeuf 8. Jaune d’oeuf (ovule) 9.Point blanc puis embryon 10 Jaune d’œuf (vitellus) jaune 11. Jaune d’oeuf blanc 12 Blanc d’oeuf (Albumen) 13. chalaze 14. Chambre à air 15. cuticule Domaine public

Les mâles transfèrent le sperme lors de l’accouplement en appliquant leur cloaque sur celui de la femelle . Ces dernières peuvent stocker le sperme pendant quelques semaines voire plusieurs années pour certaines espèces . Elles peuvent ainsi féconder les œufs au fur et à mesure de la descente des ovules dans l’oviducte. 

La coquille est terminée dans la nuit et les œufs sont pondus le matin ce qui permet de ne pas alourdir l’oiseau pour les vols de la journée. La femelle en pond un par jour. C’est le temps qu’il lui faut pour former la coquille de l’œuf suivant à base de calcium. S’il y a 5 œufs, la femelle ne débutera la couvaison qu’au 5e jour pour que tous les œufs éclosent au même moment. Chez les rapaces, c’est un peu différent et la femelle commence la couvaison dès le premier œuf. Leur nombre va de 1, comme chez le condor, à 17 chez la perdrix grise.

L’embryon se fixe sur le jaune via le disque germinal. Il s’y développe ensuite en puisant dans le jaune les réserves lipidiques (vitellus) dont un fœtus a besoin .  

Couleurs

En général, les œufs pondus par les vertébrés sont blancs, car c’est la couleur du carbonate de carbonate de calcium avec lequel ils sont faits. Mais certains oiseaux, et notamment des passereaux, pondent des œufs colorés qui peuvent être bleus, verts, jaunâtres ou bruns.  Les couleurs vertes et bleues viennent de la biliverdine qui est un pigment biliaire. Les couleurs jaunâtres, beiges, rouges ou brunes sont produites par la protoporphyrine qui est secrétée par la glande coquillière située dans l’utérus de la femelle.

Oeufs de Jacana à poitrine dorée (Actophilornis africanus) Domaine public
Oeufs de Merle noir (Turdus merula) Domaine public
Oeufs de Turnix de Madagascar(Turnix nigricollis) Domaine public

Les oiseaux sont les seuls animaux qui pondent des œufs tachetés. Les spécialistes qui se sont interrogés sur la question ont d’abord cru que cette pigmentation pouvait avoir une fonction de camouflage, puis ils se sont rendu compte qu’il y avait aussi des œufs tachetés chez les espèces qui dissimulaient très bien leurs œufs.

Oeufs par Adolphe Millot Domaine public

D’après Andrew Gosler, de l’institut d’ornithologie Edward Graw à owford, les taches pourraient avoir pour fonction de rendre la coquille plus dure. Cette idée est apparue après que des équipes qui étudiaient les mésanges charbonnières aient constaté que les œufs pondus dans des environnements pauvres en calcium étaient plus tachetés que les œufs pondus dans des environnements où le calcium était disponible en grande quantité . Les chercheurs ont alors émis l’hypothèse que les taches venaient renforcer la coquille pour compenser la faible présence du Calcium.

Les taches peuvent également servir de marquage pour aider les parents à reconnaitre leurs œufs. 

Taille et forme

Les œufs ont des tailles très différentes selon l’espèce . Leur poids peut aller de 0,5 gramme pour les plus petits oiseaux à 1, 5 kilos pour l’autruche. Le plus gros œuf d’oiseau était celui de l’Aepyornys appelé plus communément, l’oiseau-éléphant. Cet oiseau aujourd’hui disparu, vivait sur l’ile de Madagascar.  Il mesurait entre 2 et 4 mètres et les gros mâles pouvaient peser jusqu’à 500 kg.  Leurs œufs mesuraient 34 cm et avaient une contenance de 9 litres.

Squelette et oeuf de l’Æpyornis. Domaine public
Æpyornis adulte Domaine public

Proportionnellement, les œufs des petits oiseaux sont souvent plus gros que ceux des gros oiseaux . Ainsi, l’œuf d’un roitelet pèse 1/7ème de son poids alors que celui du cormoran n’en pèse que 1/25ème.

La cause vient de ce qu’un œuf trop petit ne pourrait pas garder assez de chaleur et d’humidité et ne permettrait pas à u fœtus de se développer normalement.

Mais la nature est complexe et la dimension de l’œuf n’est pas toujours en rapport la taille de l’oiseau . les colibris, par exemple,  n’ont pas les plus petits œufs alors que certains de leurs membres sont les plus petits oiseaux. Le coucou gris de son côté  pèse 110 à 140 grammes  et produit des œufs qui ont la taille de ceux des moineaux qui pèse 30 grammes.  Mais cela n’est pas un hasard et permet à la femelle coucou de poser ses œufs dans le nid des petits passereaux et de tromper leur attention.

La cause vient de ce qu’un œuf trop petit ne pourrait pas garder assez de chaleur et d’humidité et ne permettrait pas au fœtus de se développer normalement.

Mais la nature est complexe et la dimension de l’œuf n’est pas toujours en rapport la taille de l’oiseau. Les colibris, par exemple, n’ont pas les plus petits œufs alors que certains de leurs membres sont les plus petits oiseaux. Le coucou gris de son côté pèse 110 à 140 grammes et produit des œufs qui ont la même taille que ceux des moineaux qui pèsent 30 grammes.  Mais cela n’est pas un hasard. La femelle coucou peut ainsi déposer ses œufs dans le nid des petits passereaux sans attirer leur attention. Des oiseaux de même taille peuvent aussi avoir des œufs de taille très différente.

C’est le cas du merle et de la bécassine des marais.  Les deux font sensiblement le même poids, mais les œufs de la deuxième sont bien plus gros que ceux du merle. L’explication donnée à cette différence est que la bécassine, contrairement au merle, est un oiseau nidifuge dont les petits sont très rapidement autonomes. Il leur faut donc un œuf plus gros pour avoir des réserves de nourriture suffisantes qui leur permettront de marcher très peu de temps après être sorti de l’œuf .

L’ explication vaut ce qu’elle vaut. Avec la nature, il faut tout de même faire attention à ne pas tirer trop vite des lois générales qui pourraient être contredites par des cas particuliers   . D’autres oiseaux nidifuges pondent des œufs plus petits et leurs juvéniles se débrouillent pourtant très bien.

Forme

La forme est également très variée puisqu’il y a des œufs ovales que tout le monde connait, mais aussi des œufs sphériques, des œufs piriformes, des œufs elliptiques ou des œufs biconiques . Cela va de l’œuf du hibou, qui est presque rond, à celui du Guillemot de troïl (Uria aalge), qui est le plus allongé et le plus asymétrique.  

Oeufs de Hibou Domaine public
Oeuf de Guillemot de troïl Domaine public

Comme tout ce qui existe dans la nature, leur forme n’est jamais un hasard, mais est déterminée soit par une cause soit pour servir une fonction.

De nombreux facteurs influent sur leur forme et plusieurs hypothèses sont avancées pour essayer d’en comprendre les causes .

La forme ovale , qui est la plus fréquente, est due au rétrécissement de l’isthme qui est la partie de l’oviducte dans lequel la membrane de l’œuf se forme.  Pour passer, l’œuf doit s’allonger et prendre une forme elliptique.

Les ornithologues ont longtemps pensé que leur forme était déterminée par les milieux dans lesquels les oiseaux nidifiaient.  Ils pensaient, par exemple, que les oiseaux qui vivaient au bord des falaises avaient des œufs plus pointus pour éviter qu’ils ne chutent . Les œufs pointus ont tendance à tourner sur eux même et à revenir à leur place au lieu de rouler. 

Des études récentes menées par l’équipe de Mary Stoddard ont apporté d’autres réponses à cette interrogation .

Les chercheurs ont créé pour cela un programme informatique nommé Eggxtractor capable de comparer avec une grande précision les différentes caractéristiques de plus de 50 000 œufs.

À partir de ces données, les chercheurs ont pu déterminer que les critères qui influent le plus sur la forme des œufs sont la forme du nid et sa localisation, la taille de la couvée, mais aussi le type de vol . Ils ont notamment remarqué que les espèces qui volent beaucoup ont tendance à avoir un corps fuselé et donc une petite capacité abdominale.

Selon Mary stoddard, cette contrainte agit sur les œufs qui prennent une forme plus allongée .

À l’inverse les oiseaux qui volent moins ont un abdomen plus large et donc des œufs plus courts, voire presque ronds.

Les manchots étaient les seuls oiseaux dont les caractéristiques ne collaient pas avec les résultats de l’étude . Ils ne volent pas et ont pourtant des œufs allongés. Mais la raison est simple à comprendre. Eux aussi doivent avoir un corps fuselé pour pouvoir fendre les eaux dans laquelle ils passent le plus clair de leur temps. 

Dans « le secret des oiseaux » Wenfei Tong rappelle que l’œuf est une belle invention qui permet à la femelle de se libérer de son fœtus à un stade de développement précoce. la fin de la gestation se fait dans le nid grâce à l’œuf qui est comme un double projeté du ventre de la mère. 

Wenfei tong pense même que cette stratégie permet de créer une plus grande égalité entre les sexes.  Elle écrit : « Il devient plus difficile pour le mâle de disparaitre s’il doit rester avec sa compagne jusqu’à l’éclosion pour s’assurer que sa descendance vivra. A ce stade leur investissement génétique commun se trouve hors du corps de leur partenaire, ce qui donne à la femelle une chance presque égale de s’éclipser en premier. »

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