- Règne : Animalia
- Embranchement : Chordata
- Classe : Aves
- Ordre : Colombiformes
- Famille : Colombidae
- Sous famille : Raphinae
- Genre : Raphus
Présentation
Le Dodo est un oiseau de l’ordre des Colombiformes de la famille des Colombidae et de la sous-famille des Raphinae. Cette dernière sous-famille comptait dans ses rangs deux oiseaux aujourd’hui disparue. le Dronte de Maurice, appelé communément Dodo, et le Dronte de Rodrigues ou solitaire de Rodrigues (Pezophaps solitaria) qui vivait lui aussi dans l’archipel des Mascareignes, mais uniquement sur l’ile Rodrigue qui lui a donné son nom.
L’histoire du Dodo est connue et mille fois racontée, mais dans un livre sur les animaux et les oiseaux en particulier je voulais absolument évoquer son cas, car il est symptomatique du mépris avec lequel les humains ont toujours traité les animaux .
Le pire est que les dodos étaient des animaux placides et sans défense, qu’ils ne posaient aucun problème aux humains et qu’il ont été décimés dans l’indifférence totale . Leur disparition est quasiment passée inaperçue. On sait qu’il n’y avait plus aucun individu vivant dans les années 1700, mais personne ne peut dire à quelle date précise le dernier dodo a disparu .Certains évoquent les années 1650, d’autres affirment l’avoir vu en 1660 . Ce qui est sûr c’est que personne ne les considérait et que personne ne s’est soucié de leur disparition. Il sont devenus aujourd’hui le symbole des espèces dont l’extinction est directement imputable aux humains.
Un peu d’histoire
Le Dodo est apparu il y a plus de quatre millions d’années sur l’île Maurice et il y a vécu paisiblement pendant des millénaires. On pense que leur population comptait alors plusieurs milliers d’individus et qu’ils vivaient tranquillement sur cette ile où ne se trouvait alors aucun humain. N’ayant pas de prédateurs, et donc aucune raison de s’enfuir, sa morphologie s’était peu à peu modifiée . Ses ailes s’étaient atrophiées puis sa queue avait disparu puisqu’il n’avait plus besoin de gouvernail pour voler.
Les dodos sont décrits comme des oiseaux très lents, plutôt imposants et ne fuyant pas l’homme . Vivant en paix depuis toujours avec les autres animaux de l’ile, ils avaient perdu également toute méfiance et toute agressivité.
La disparition
Alors qu’ils avaient traversé plusieurs millénaires sans souci sur l’ile Maurice , l’arrivée des Européens dits « civilisés » fut pour eux le début de la fin . Les Portugais débarquèrent d’abord en 1598 puis ce fut le tour des Néerlandais , des Français et des Anglais . Les marins qui n’avaient pas mangé de viande pendant les mois de voyage en bateau en tuèrent un grand nombre pour se nourrir. Le capitaine Castelon qui mouilla à Madagascar en 1620 décrit le Dodo ainsi . « C’était un grand oiseau de la taille d’un dindon, très gras, et avec des ailes si courtes qu’il ne pouvait pas voler ; nos hommes le tuaient avec des bâtons et des pierres. Ils se sont nourris de la chair de cet oiseau.”.”.
Des bâtons et des pierres suffisaient en effet pour le tuer puisque l’oiseau ne fuyait pas. Mais le pire fut certainement les dégâts occasionnés par les animaux qui n’existaient pas auparavant sur l’ile et que ces voyageurs avaient amenés avec eux comme les chiens, les chats , les cochons ou des macaques crabiers. Ils amenèrent également quantité de rats qui vivaient alors en nombre dans les cales des navires . Laissés libres et livrés à eux-mêmes, tous ses animaux se développèrent rapidement. Les uns piétinèrent les nids ,les autres se nourrissaient des œufs ou amenaient de nouvelles maladies. Une autre cause importante de leur disparition fut la destruction des forêts dans laquelle ils vivaient puis la replantation par les colons d’essences européennes qui ne leur convenaient pas du tout .
Les premiers colons arrivèrent en 1598 et réussirent à exterminer totalement l’espèce en moins de 100 ans . On ne peut qu’être songeur devant la capacité de destruction des hommes dits civilisés et se demander si Cioran n’avait pas raison quand il écrivait que « le progrès n’est rien d’autre qu’un élan vers la pire ».
Avec violence ils avaient été traités par les humains , avec violence il furent oubliés par eux .
Moins d’un siècle après sa disparition, un banquet fut organisé par le gouverneur de Maurice . Une trentaine de personnes âgées de plus de 70 ans furent interrogées à leur sujet . Pas une ne s’en souvenait. Pas une seule n’en avait entendu parler.
Le dénigrement
Buffon en dresse un portrait terrible dans son histoire naturelle publiée en 1788 qui montre tout le mépris que les humains avaient développé envers cet oiseau :
« Représentez-vous un corps massif et presque cubique, à peine soutenu sur deux piliers très gros et très courts, surmonté d’une tête si extraordinaire qu’on la prendrait pour la fantaisie d’un peintre de grotesques; cette tête portée sur un cou renforcé et goitreux, consiste presque toute entière dans un bec énorme où sont deux yeux noirs entourés d’un cercle blanc, et dont l’ouverture des mandibules se prolonge bien au-delà des yeux, et presque jusqu’aux oreilles: ces deux mandibules concaves dans le milieu de leur longueur, renflées par les deux bouts et recourbées à la pointe en sens contraire, ressemblent à deux cuillères pointues, qui s’appliquent l’une à l’autre la convexité en dehors: de tout cela il résulte une physionomie stupide et vorace, et qui, pour comble de difformité, est accompagnée d’un bord de plumes, lequel suivant le contour de la base du bec s’avance en pointe sur le front, puis s’arrondit autour de la face en manière de capuchon, d’où lui est venu le nom de cygne encapuchonné (cycnus cucullatus). »
Le portrait est d’autant plus choquant et surprenant que Buffon n’a jamais vu le dodo « en vrai » et qu’il s’inspire pour le faire de descriptions et d’ illustrations anciennes réalisées par des voyageurs qui avaient pu le rencontrer sur l’ile Maurice 100 ou 150 ans auparavant (son texte a été écrit dans les 1780) . “
Son texte ressemble d’ailleurs plus au portrait à charge d’un procureur général qu’a une la description objective et neutre d’un scientifique puisqu’il n’a de cesse de le dénigrer et qu’il poursuit moqueur en écrivant :
« La grosseur qui, dans les animaux, suppose la force, ne produit ici que la pesanteur; l’autruche, le touyou, le casoar, ne sont pas plus en état de voler que le Dronte, mais du moins, ils vont très vite à la course; au lieu que le Dronte paraît accablé de son propre poids, et avoir à peine la force de se traîner. » « on le prendrait pour une tortue qui se serait affublée de la dépouille d’un oiseau, et la Nature en lui accordant ces ornements inutiles, semble avoir voulu ajouter l’embarras à la pesanteur, la gaucherie des mouvements à l’inertie de la masse, et rendre sa lourde épaisseur encore plus choquante, en faisant souvenir qu’il est un oiseau. »
On imagine bien qu’un scientifique qui écrirait aujourd’hui un article de ce style sur un animal serait heureusement immédiatement montré du doigt et aurait beaucoup de mal à poursuivre sa carrière.
L’intérêt de ce genre de texte montre à quel point les mentalités ont évolué même si le combat pour le respect des droits des animaux est loin d’être terminé . Les tortures que l’on inflige encore aujourd’hui aux animaux pour le soi-disant « bien de l’humanité » montrent qu’il y a encore beaucoup de travail à faire pour éduquer les ignorants de la cause.
Mais Buffon ne fut pas le seul a maltraiter et à humilier le dodo . Comme si les humains avaient enfin trouvé le souffre-douleur idéal, comme s’ils avaient enfin trouvé la victime expiatoire dont la souffrance allait permettre de restaurer l’intégrité fragile du groupe, les coups et les insultes arrivèrent de partout et le dodo fut accusé de tous les maux.
Les Hollandais qui venaient de débarquer l’appelèrent walg-vogel ou oiseau de dégout à cause de sa figure qu’ils trouvaient rebutante, mais aussi à cause du mauvais gout de sa chair.
Cette réalité n’est d’ailleurs pas avérée puisqu’on peut lire quasiment l’inverse dans le journal de bord du navire Gelderland qui arriva sur l’ile Maurice quelques années après :
« Ces oiseaux vivent à Maurice où on peut les rencontrer en grand nombre. Ils y pullulent car ils ne peuvent s’échapper de l’île, étant inaptes au vol. Ils nous procurent une nourriture valable qui nous rassasie à satiété. Souvent, ils ont une pierre dans leur gésier, aussi grosse qu’un œuf de poule, parfois moins, nous les avons nommés «oies de kermesse».
Description
Le dodo était un oiseau endémique * de l’ile Maurice dans l’archipel des Mascareignes . Il mesurait un mètre et pouvait peser entre 10 et 20 kilos. Pour donner une idée, on peut dire qu’il avait à près la taille d’un cygne . Sa durée de vie était de 30 ans ce qui est plutôt long pour un oiseau . Son corps était recouvert de plumes bleu gris ou jaune et il avait quelques plumes en guise de queue . Ses pattes étaient de couleur jaune et comportaient quatre doigts qui se terminaient par de grands ongles noirs . Son bec était long et crochu et particulièrement bien adapté à son alimentation faite de grains , de fruits durs et coquillages et d’escargots . Certaines sources disent qu’une tache bleue se trouvait à l’extrémité de son bec et une autre rouge sur la mandibule inférieure.
L’une de ses premières descriptions se trouve dans le livre de bord du Gederland. Le bateau arriva sur les côtes de l’ile Maurice le 17 septembre 1598 dans la baie de Warwick au niveau de l’actuel grand port. Le texte raconte le débarquement de quelques marins puis le retour le soir des hommes à bord . En plus de son émerveillement devant la richesse exceptionnelle de la faune, le capitaine y fait une description détaillée du Dodo qu’il vient de rencontrer sur l’ile.
« «Là-bas, il y a encore d’autres oiseaux, aussi gros que nos cygnes, avec de grosses têtes, couronnées d’une peau plissée leur donnant l’apparence d’avoir un petit bonnet. Ils n’ont pas d’ailes et c’est pour cette raison qu’à leur place figurent trois ou quatre pennes. Là où devrait se trouver la queue, il n’y a que quatre ou cinq duvets frisottants de couleur grisâtre. Nous appelons ces oiseaux, des «oiseaux dégoûtants», uniquement parce que, malgré de longues cuissons, leur chair reste très coriace, excepté la poitrine et le gésier qui s’avèrent très bons. D’autre part, nous disposons à satiété d’une grande quantité de tourterelles d’un bien meilleur goût»
Nidification
Le nid des dodos était construit avec des feuilles de palmier à même le sol. Cette situation le rendait extrêmement vulnérable face aux attaques des chiens ou des cochons sauvages qui les piétinaient puis mangeaient le contenu des œufs. Cette vulnérabilité fut l’une des raisons de la disparition de l’oiseau . La femelle y pondait un seul œuf qui était couvé à tour de rôle par les parents.
Alimentation
Sur son mode d’alimentation, il existe plusieurs versions. En 1631 un voyageur écrivait qu’ils se nourrissaient de fruits crus . Le naturaliste Henri de Blainville, lui, pensait que les Dodos étaient proches des vautours et qu’ils se nourrissaient de la chair d’animaux morts . Linné et cuvier les imaginaient plus proches des gallinacées et les pensait granivores . Le peintre belge Roland Gravery* connu pour ses peintures du Dodo réalisé dans les années 1610 les voyait manger des coquillages et des escargots .
Nous ne saurons jamais vraiment quelle était leur nourriture de prédilection, mais des études récentes semblent montrer que les dodos se nourrissaient principalement de graines et de fruits et qu’ils pouvaient aussi, comme de nombreux oiseaux opportunistes, gober quelques escargots à l’occasion .
Historique de l’île Maurice
Les scientifiques pensent que l’ile Maurice avait été habitée par les austronésiens bien avant les premiers Portugais à qui l’on attribue souvent la découverte de l’île . Officiellement, elle aurait été « découverte » en 1500 par Diogo Diaz un capitaine de vaisseau de la marine portugaise qui aurait également découvert Madagascar et la réunion. Cette notion de « découverte » d’iles lointaines par des Européens est bien sûr toute relative et montre surtout par sa formulation presque naïve le côté colonisateur et dominateur des peuples européens. Des recherches récentes ont montré que les austronésiens avaient vécu en 2000 av. J.-C. sur l’ile de Madagascar qui se trouve à peine 800 kilomètres de Maurice . Les historiens pensent que les Arabes y sont également venus puisque l’ile Maurice apparait sur le planisphère de l’italien Cantino sous le nom arabe de Dina Arobi ou l’ ile abandonnée . On y trouve également l’ile voisine de Rodrigue sous le nom de Dina Mozare (l’ile de l’est ). On dira donc, pour ne pas être trop moqueur, que les Portugais ont découvert en 1500 ce que bien d’autres peuples avaient découvert avant eux.
Étymologie
L’origine du nom vernaculaire Dodo n’est pas certain. D’après certaines sources, le mot pourrait venir du néerlandais dodars ou dodoors qui signifie paresseux. Mais d’autres sources pensent qu’il pourrait venir du néerlandais Dodaars qui signifie fesses nouées ou cul en touffes selon les traductions . Le mot ferait référence à la forme que les prennent les plumes de sa queue.
D’autres pensent que faisant partie de la famille des Colombidae il pouvait avoir un chant à deux tons du genre « dou -dou » proche du « rou-rou » des tourterelles.
Une dernière proposition fait venir le mot du portugais « doudo » « doido » qui veut dire fou , simplet , stupide ou idiot. L’adjectif viendrait de la surprise provoquée » par le côté lent et sans crainte de ces oiseaux qui n’avaient vu que très peu d’humains .
Il semblerait que le nom Dodo soit apparu pour la première fois dans les mémoires de voyage de l’anglais Thomas Herbert en 1629.
Pour le mot Dronte rien de bien sûr là non plus . Il descendrait d’un mot indigène de l’ile Maurice . D’autres pensent qu’il vient d’un mot néerlandais qui signifie gonflé ou enflé et fait référence aux formes arrondies de l’oiseau
Raphus: Terme créé par le zoologiste et physicien Mathurin Jacques Brisson en 1760 en référence au nom Raphos qui avait été utilisé par le médecin Grec Claude Galien pour designer l’Outarde.
Le qualificatif « cucullatus » vient d’un mot latin qui signifie « qui a un capuchon « . Cela fait allusion au plumage de la tête qui forme comme une capuche ou un bonnet .
Linné l’avait tout d’abord nommé « Didus ineptus » qui est , là encore, une nomination méprisante.
« Didus » vient du mot dodo et « ineptus » est un mot latin qui signifie maladroit , gauche , sot , idiot . il fait référence ici à l’attitude de l’oiseau qui était considéré par les humains qui l’ont rencontré comme stupide. Je ne peux que penser ici à cette attitude si fréquente chez les humains qui consiste à projeter sur l’autre ce que l’on porte en soi.
Classification
La forme surprenante du dodo rendit sa classification difficile . Parfois comparé à une oie ou à un dindon, il est aussi comparé à un pigeon, à un vautour et même à un aigle à cause de ses fortes pattes munies de serres . D’autres pensaient que sa taille et son allure le rapprochait des autruches ou des casoars . On retrouve également dans les écrits de l’époque de très nombreuses descriptions qui le comparent à nos cygnes européens.
Un zoologiste irlandais, Nicolas Aylward Vigors , le classa d’abord en 1823 parmi les gallinacés, car il trouvait qu’il ressemblait aux coqs. Le bon classement ,qui n’a toujours pas été remis en cause aujourd’hui, fut apporté en 1843 par le professeur de zoologie danois John Théodor Reinhardt qui le rangea dans l’ordre des colombiformes.
Des études plus récentes qui utilisent la génétique ont montré que les choses étaient un peu plus compliquées que cela et qu’au sein des colombiformes il faisait partie avec le solitaire de rodrigues de la sous-famille des Raphinae.
Parmi les espèces vivantes on considère que le Nicobar à camail ou pigeon Nicobar est l’oiseau qui est génétiquement le plus proche du Dodo.
Expression
Faire Dodo :
Dormir ou aller au lit
Vrai ou faux ? La légende dit que l’expression aurait été ramené par les marins qui avaient vu le calme et la lenteur du dodo sur l’île maurice. Du coup, quand ils voyaient quelqu’un qui était mou ou pas bien réveillé ils disaient : – « il fait le dodo » .
les anglais disent « To go way of the dodo » ou « suivre le chemin du Dodo » c’est-à-dire disparaitre ou mourir .
Ils emploient également l’expression « Dead as a dodo » ,aussi mort que le dodo.